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Photo du rédacteurCretté Alexandra

Lettre de JJJJ Rolph à Alexandra Cretté - Paris, A l’ombre de Delph


Mon amie,

Tombèrent dru à mes pieds toutes villes dont j’épouse le rire. Mais à chaque ville que j’aime

l’horreur s’installe et prend racine. Il m’a fallu aimer à ce point Port au prince, pour qu’un

jour, des corps se mettent à bruler. Je n’ai appris que dernièrement qu’un truand du

ministère de l’injustice de mon pays, s’exerce à couper les dreads pour purifier sa ville. J’ai

eu peur depuis, d’aimer les villes comme les femmes. Pour que violence cesse d’habiter mes

pas. Pour que belle soit toutes villes qui s’éloignent de moi.

Mon amie, Paris se lève tôt ce matin et adopte les pas pressés d’une Londonienne. On a marché sur Paris avec deux accents différents : elle me parlant si bien de la charge mentale des femmes dans ce lieu maudit qu’est le couple, et moi répétant les mots inscrits sur le temple de Delphes : 

«Connais-toi toi-même ». On a ri. Il y a eu entre nous l’amour de Londres et de Port au prince.

S’étend aussi sur nos cœurs, ce que j’appelle l’expérience Guyane.

Mon amie, tu m’écris les horreurs du Brésil. Je tends mon cœur cause commune à tous les malheureux du mon entier.

Quand il me prend la peur d’être haïtien, le cubain en moi me sauve de moi-même. Car, il

m’a fallu aimer le Brésil, pour que l’on incendie la forêt sous mes yeux et que le petit zézé ne

trouve plus d’oranger à sa taille. J’ai revu Émile à Paris. Il tenait dans ses bras la même folie

qu’il nous forge en Guyane, avec un air un peu plus serein. Il est artiste et infaillible, notre

Émile B.

Mon amie, que dois-je faire quand le mal ronge une par une les villes que j’admire ?

Comment épeler la vie à ce pauvre paysan dont le seul péché est de rester toujours digne ?

Je n’ai jamais aimé les soleils qui ne brulent pas pour tous. Je n’ai jamais su dire aussi le

malheur comme il faut.

Mon amie, je suis sorti de Paris comme je sors souvent de mon être.

Sans rêve et orgueil précis. Tu te dis souvent choquée de ma nonchalance et de ma tendre

façon de me laisser tuer par le temps. L’affaire est que tu n’as pas eu l’occasion de m’apprendre à étrangler la vie, quand elle devient laide et désobligeante. Toi, aussi, tu ne massacres rien ni personne. Tu arrives dans la vie avec de grands yeux pour aimer ou pour pleurer quand l’impuissance te mange le ventre.

Delph elle, m’aurait appris tant de choses.

Mais, on s’est croisés trop tard, j’ai déjà trop d’éternité à son gout. Je suis sorti de Paris que

j’adore (malgré la tour Eiffel), pour voir si je suis capable d’aimer la France tout entière

(malgré l’esclavage).

Mon amie, il faisait froid à Auxerre et j’ai aimé Philoctete plus que jamais : « Je reviens fatigué des giboulées du nord, le soleil que j’ai bu est froid comme la mort ». Le festival s’est voulu Fata Morgana, il y eu a des bouches, l’alcool et non-dits, des culs qui respirent la rage, et ce beau corps qui fait jeunesse. J’ai voulu comme Émile, Delphine, Ada, Mike, Elsa, Lucas…….. et les amis de la colline du crack, avoir la force de danser mes trois jours, comme s’ils étaient le dernier. L’Haitien en moi refuse de comprendre une fête de trois jours, sans danse de couple. Pourquoi me suis-je fait une telle violence mon amie ? Explique le -moi, je t’en prie.




JJJJROLPH






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1 Comment


williamsonorneus
Aug 19, 2023

Tu écris toujours si bien.

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