Dans les métros, un peu de chez toi te tambourine aux oreilles
Un bref sourire s’esquisse discrètement
Il ne faut pas te faire remarquer
La masse s’agglutine
de stations en stations
Elle t’enveloppe, nauséabonde
et t’écrase
sous une couche de sueurs ouatées
Elle te suffoque et t’éjecte
à chaque arrêt ou montée
Les murs glacés sont vides de gens
Les murs figés par les call-to-action
assenés de phrases vagabondes,
témoignent de l’état de droit.
Les journées passent semblables à la veille
Le soleil est faible dans cette partie du monde
Les arbres ne cachent même plus la forêt
Faite de verrières, briques en ciments.
Les chemins polis,
artificiels
Les traces de terre,
sont éphémères
Les floraisons
tardent souvent
Tu cries anmwé
Le téléphone sonne tous les dimanches matins
Estompées par la distance, leurs voix ne te suffisent pas
Histoires drôles, commérages ou avis de décès
Ce triptyque t’ennuie à chaque fois
Tu souhaites les écouter débattre à la table des grands
Refaire le monde abreuvé de canne et de sirop collant
Leurs visages pixélisés, le tien emmitouflé
rappellent violemment ton exil
celui que tu as délibérément choisi
celui qui te libère de leur sort
celui qui te broie une fois le téléphone noirci
celui qui provoque ces éruptions de larmes.
Tu cries anmwé
C’est la fin de la semaine
Cap sur les meilleures soirées
Appartement ou boite
rouge ou noir
Qu’importe
Les bouteilles sont tes nouveaux réchauds
Les amis, des portes gobelets
Les nuages se forment dans des pièces à l’étroit
Où s’empilent sans distinction
commandes, déchets et erreurs de jeunesse
Lit après lit, tu sèmes la solitude
Tu files une vie sulfureuse
A l’université, tu craches sur les brochures mensongères
Ta présence est soutenue par des bourses
L’avenir radieux s’éloigne
De ton radeau de palétuviers
Et il te faut survivre
marer les reins
faire le guet
attendre la marrée
tendre la corde
amarrer la prochaine lune.
Tu cries anmwé
Les résultats tombent
Les larmes ruissèlent sur ton visage asséché
Les couleurs te manquent
Le gris est permanent
Tu blanchis aussi vite que la ville défraichie
Quel est ce pays où le bonheur semble être resté en mer ?
Plus grand sera l’enracinement
Plus loin seront les éléments
qui font du cœur un repère à souvenirs.
Ils poursuivront leur existence
et la tienne échappera au temps.
Surtout ne te perds pas,
Une bouteille échouée touchera toujours terre.
Anmwé
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