Etranjé
Par de là les mers, te voici échoué
Sur une plage, sous un kiosque
Interdit de rêver
Fatigué du voyage, tu demandes le répit
Sur une terre vendue comme ayant une bien meilleure vie
Un toit, des vêtements, des écoles, pleins enfants…
Une bien meilleure vie
Meurtri par ta propre patrie
Sur une terre inconnue qui jadis
qui l’eut cru,
Accueillait
à la volée ou accostés
cultivateurs,
orpailleurs, cambrioleurs, colons et bien penseurs
rescapés de la Montagne Pelée
Les âmes en perte, les condamnés, les effrontés,
Les résistants, les compétents, les bienveillants.
Là où la mer caresse les mangroves et les bâtiments en tôle
S’envolent Ibis, Toucans et puis âmes en avion
Accostent alors
des baroudeurs, à la Indiana Jones
des fonctionnaires, avec primes de survie
sur une terre ferme et close
verdie de malheurs
maltraitée, injustement pillée
Toi, étranger
Toi, étranger débarqué sur cette terre maudite
Que viens-tu apporter ?
Ta misère est la bienvenue
Puisses-tu la fructifier
Car après tout
Cette terre l’aimes-tu comme ton pays
Etranger à nationalité
Bleu comme le ciel perdu
Blanc comme ton vêtement souillé
Rouge du sang des captifs
Etranger dit-moi
Tiens-tu à la respecter
Tiens-tu à l’aimer
Tiens-tu seulement à vivre entre
Le Kourou spatial et le Sinnamary russie
A prendre la place et compétences des natifs roussis
Probablement critiquer les vieux tchip d’une mamie du coin
Où est-ce de l’ingérence des caïmans vautrés sur les berges du marais
que tu discuteras en commission pour permissions
Oh quelle fortune de voguer carbets après carbets !
Plus un sous cette semaine,
Tiens voilà un prêt
Et puis, l’Etat, lui, te soutient
Développe donc le tissus défraîchi
Rapiécé par des mains encornées
la toile décousue
anéantie au fil des années
Non, tu n’y es pour rien
Toi
Mais tu nies quand même
Être porteur sain de cette maladie invasive
Qui parasite les terres
conquises
et s’installent piti piti
en jetant de leur nid
tout oisillon prêt à voler
sans le vouloir
oui c’est certain
sans excuses
sans anyen
mais bon tu n’es pas bien méchant
tu as reçu une bonne éducation
à la baguette, au fromage et au beurre
tu sais bien, toi, comment le monde avance
puisque du monde ton état
en a fait un quatre-quarts
et tiens, en-revoilà une part
tu voudras bien d’une bonne mutation
une aventure au saut de ton choix
aller chasser les vers de terre
exploration
goûter l’amer
la noix
de la coco
Combien d’entre-nous n’ont même pas vu Morpio
Ni même aperçu un Morpho
Certains endroits ne vivent rien que pour toi
Et ça vraiment ça ne te dérange pas ?
Allez, ne t’en fait pas
Personne ici ne te fustigera
Conquistador au temps du net
Tu fais la loi
Depuis les bacs de sable
A l’inselberg
jusqu’au prochain départ
dit-toi étranger
QUE VIENS-TU FAIRE EN GUYANE ?
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